Biographie
La photographie est indissociable de la lumière. Pourtant, Michel Paradinas, c’est bien dans l’ombre qu’il a abordé cet art majeur de façon professionnelle. C’est d’abord dans l’obscurité de son laboratoire que s’est pleinement révélée cette passion protéiforme dont il allait faire profession. Un long chemin de clairs-obscurs de bientôt cinquante ans, depuis ces jours de tendre enfance où son œil rêvait déjà de photo, collé à la housse de cuir d’un Foca Sport, l’appareil amateur de son père. Quelques boîtiers et stages d’initiation plus tard, il allait participer à la création pour la ville de Toulouse, en 1983, de l’Entité photographie de l’Espace Saint-Cyprien.
Dès 1985, ayant en charge la programmation de stages avec des photographes de renom, il fait la connaissance de Philippe Salaün, photographe et tireur, qui réalisait alors des tirages pour des figures tutélaires telles que Robert Doisneau, Willy Ronis, Izis ou encore Seidou Keita. Les encouragements de ce nouvel ami l’incitent alors à créer, avec son précieux soutien, son propre laboratoire. L’idée était de proposer aux photographes des développements de films et des tirages d’exposition sur support papier traditionnel de qualité. Seul l’atelier de Jean Dieuzaide, autre grand nom de la photographie française – proposait alors ce genre de prestation à Toulouse. Cette belle aventure aura duré dix-huit ans alors que les plus optimistes ne lui donnaient pas six mois.
Très engagé dans cette activité de tirage – trop souvent ignorée mais ô combien essentielle – il ne cessait pour autant de capter la vie telle qu’il la percevait derrière son viseur. En parallèle, il pratiquait un photo-reportage très inspiré par le travail de Raymond Depardon, Guy Le Querrec ou Henri Cartier-Bresson, en revendiquant l’influence déterminante du photographe documentaire Eugène Atget. Ses années de sociologie à la faculté du Mirail donneront de l’épaisseur au sens de ce travail.
Une bourse d’aide à la création obtenue à Albi en 1986 lui permettait d’aborder la photographie de paysage, en moyen format. Une nouvelle piste qu’il suivra jusque dans le désert pour une série intitulée Tassili (1987) et au Burkina Faso (en 1989 et 1990). Ce voyage vaudra à l’un de ses clichés de recevoir le premier prix Ilford. L’Espagne, le Portugal, l’Italie, l’Australie, New York… ne cesseront dès lors d’élargir le champ de ses regards insatiables.
Sa première participation au festival photographique d’Arles, à partir de 1984, d’abord en tant que stagiaire puis dans le rôle de maître de stage, allait conforter la pertinence de son chemin et lui ouvrir les portes de l’École nationale de la photographie. Il en devenait ainsi l’un des intervenants (1997, 1998 et 1999).
La photo n’échappe pas aux grandes mutations technologiques. C’est ainsi qu’à partir de 2012, il décidait de saisir le monde en mouvement avec son téléphone portable. Il réalisait ainsi trois séries d’images dont l’une devait aboutir à une exposition intitulée Le sens de la marche.
Cette enrichissante parenthèse refermée, il a souhaité retrouver sa matière historique : l’argentique et les si belles exigences du noir et blanc. Pour cela, il fait en premier l’acquisition d’un sténopé pour réaliser une série sur le marais avec le procédé positif direct, ensuite d’une chambre photographique pour retrouver les vraies sensations avec le négatif. Des prises de vues « au naturel » qui lui semblent les mieux adaptées pour restituer la poésie singulière du marais poitevin, sa nouvelle terre d’élection et de création après les Pyrénées qu’il a tant de fois arpentées et photographiées.
Fabien Bonnet